Mis à jour le 17 Juin 2025
Perchée sur un promontoire rocheux au-dessus de la mer, tout près du petit port de Beaulieu-sur-Mer, la villa Kérylos semble défier le temps. Dès l’entrée, le visiteur quitte le présent tandis qu’au sol, l’inscription « XAIPE » en mosaïque (« Réjouis-toi » en grec ancien) donne le ton. Comment ne pas se réjouir en effet devant tant de raffinement ? Du péristyle baigné de lumière – avec ses colonnes de marbre et ses fresques délicates – jusqu’aux bains thermaux, de la bibliothèque aux chambres avec leur mobilier ouvragé, des plafonds peints aux mosaïques recouvrant le sol de chaque pièce : tout évoque l’art de vivre de la Grèce antique.
Construite entre 1902 et 1908, à la Belle Époque, elle est l’œuvre de Théodore Reinach, savant et homme d’État, et de l’architecte niçois Emmanuel Pontremoli. Tous deux passionnés par l’Antiquité, ils s’en inspirèrent pour concevoir cette demeure de villégiature, « non pas une copie d’une villa antique, mais une évocation de cette Antiquité, dans laquelle serait concentrées toutes les connaissances récemment acquises », souligne Antide Viand. Helléniste, grand spécialiste de l’archéologie grecque, Théodore Reinach participa en effet à de nombreuses fouilles archéologiques, notamment sur l’île de Délos.
Ce qui surprend entre ses murs, c’est la somme de détails présents sur chaque élément : scènes de la mythologie sur les mosaïques ou les poteries, motifs géométriques, marqueterie précieuse, plafonds richement ornés… Des plans de la maison jusqu’à chaque pièce de mobilier, en passant par la moindre fourchette ou poignée de porte, tout a été conçu et réalisé pour la villa.
En six ans seulement, Reinach et Pontremoli ont réussi à créer une œuvre unique, pour laquelle ils ont fait appel aux meilleurs artistes et artisans de l’époque, comme l’ébéniste parisien Louis-François Bettenfeld pour le mobilier, ou les peintres Jaulmes et Karbowsky, élèves de Puvis de Chavannes, pour les fresques murales. Coffres, chaises, tables, fauteuils… leurs lignes d’une grande finesse, inspirées des meubles grecs et des mondes antiques méditerranéens, se répondent dans une harmonie totale.
Une préservation exemplaire
Si la villa Kérylos et l’ensemble de son mobilier d’origine sont en parfait état de conservation, c’est grâce au propriétaire de la villa, Théodore Reinach, qui en fit don à l’Institut de France, dont il était membre. À sa mort, en 1928, ses héritiers purent continuer à l’occuper avant de la restituer totalement en 1967. Cette transmission à une institution savante a permis d’éviter les altérations ou dispersions qu’ont connues bien d’autres demeures historiques. Ainsi protégée et classée au titre des Monuments historiques depuis 1966, son éclat perdure. Elle est accessible aux visiteurs toute l’année. Plus de renseignements sur le site dédié du Centre des monuments nationaux.
Si elle donne l’illusion d’un voyage dans l’Antiquité, la villa est pourtant totalement inscrite dans son temps. Bâtie pour la famille de Théodore Reinach, issue de la haute bourgeoisie, elle comporte alors tout le confort moderne et la technologie de l’époque, habilement dissimulés. « Il y a l’eau courante, l’électricité, le chauffage central inspiré des systèmes antiques d’hypocauste, avec une chaudière tout à fait moderne, qui envoie de l’air chaud par le sol. De grands lustres évoquent des lampes à huile, mais à l’intérieur, il s’agit d’ampoules qui imitent les formes et les couleurs de la flamme. »
Les meubles de rangement prennent l’apparence de coffres, le piano se cache ingénieusement dans un meuble à battants orné de motifs antiques, et la salle de bains de Madame dispose même d’une douche multijets. Certains ornements aussi font référence à leur temps : « Si vous regardez attentivement aux murs, vous verrez notamment des motifs floraux et végétaux qui puisent dans le répertoire antique – palmettes, feuilles d’acanthe, fleurs de lotus… – mais qui sont aussi une référence directe à l’Art nouveau. »
Ce dialogue entre les siècles et les arts se poursuit aujourd’hui entre les murs de la villa, qui accueille chaque année de mai à septembre des expositions d’art contemporain. Des artistes sélectionnés pour leur vision particulière de la Grèce et de l’Antiquité, et dont les œuvres se mêlent avec harmonie aux collections permanentes, comme ce fut le cas avec les sculpteurs Hubert Le Gall en 2021 ou Arman en 2024, pour ne citer qu’eux.
Prouesse architecturale et technique, hommage érudit à la culture grecque et à son héritage, la villa Kérylos continue de faire dialoguer passé et présent, sans jamais figer le temps.
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