Publié le Mars 06, 2023Mis à jour le Mai 11, 2023
Recordman du monde de plongée libre, entrepreneur, pédagogue et conférencier, mais aussi enfant du pays et ardent défenseur de la nature : Pierre Frolla est un homme aux multiples facettes. Un hyperactif à qui rien ne fait plus peur. Ambassadeur du programme The Sea is Green, il revient avec nous sur ses interventions auprès de Monte-Carlo Société des Bains de Mer. L’occasion aussi d’évoquer la mer et la plongée, et quelques-unes de ses expériences les plus marquantes. Rencontre.
On vous définit parfois comme un “homme pressé de l’apnée” ; comment ce paradoxe est-il possible ?
Pierre Frolla : Je pense que cela répond à un besoin. J’ai un fort tempérament d’hyperactivité : depuis toujours, je suis créatif, artistique, duelliste aussi. J’aime la compétition, mais j’aime surtout gagner, réussir. Très jeune déjà, je considérais qu’il n’y avait qu’une place sur le podium : la première. Le deuxième arrivé était pour moi le premier perdant. C’est très bien pour réussir de grandes choses, mais cela ne permet pas de se donner droit à l’erreur. Ce qui est en soi une erreur ! Ce tempérament a donc eu besoin d’une balance, et je me suis tourné naturellement vers une activité qui me remplissait et me faisait grandir : la plongée libre, qui nécessite une introspection très particulière. Comme tous les êtres humains, j’ai besoin de me retrouver avec moi-même. Cela, je le vis lors de la plongée en apnée, mais aussi en montagne, au travers de grandes randonnées. Quelques heures me permettent de faire le point.
Votre lien avec les eaux qui bordent la Principauté ?
Pierre Frolla : C’est ma madeleine de Proust : un ancrage, des racines très fortes. Je fais partie d’une vieille famille monégasque. Tout l’arbre généalogique de ma famille, aussi loin qu’on remonte, est ancré à Monaco. Le frère de mon grand-père, qui était abbé, a même écrit la grammaire monégasque ! Il y a donc une forme de pouvoir historique assez importante. Ensuite, j’ai fait mes premières armes au pied de là où j’habitais, sous le Musée océanographique. Bien que j’ai parcouru le monde entier, plongé dans des mers magnifiques avec des animaux surprenants, j’ai un ancrage profond avec la mer à Monaco.
Un spot où vous aimez plonger à Monaco ?
Pierre Frolla : Sous le Musée océanographique, là où j’ai commencé la chasse sous-marine. J’y ai amené mes premiers élèves pour découvrir le monde sous-marin. Nous y avons même déplacé une épave en 2012 avec le Prince Albert II pour créer un pont écologique en forme de bateau. Un autre spot que j’adore : la zone protégée qui va de la plage du Larvotto au Monte-Carlo Beach.
Quel est votre rapport à la faune, pendant une plongée ? Se sent-on étranger ou intégré ? Protégé ou en danger ?
Pierre Frolla : Un peu tout ça à la fois. Mais les activités physiques de pleine nature permettent surtout de prendre conscience de soi dans l’élément. Quand on plonge dans un élément naturel, comme la mer, ce n’est pas du tout un retour à l’état sauvage ou à la nature, bien au contraire. On se plonge dans un environnement qui n’est pas le nôtre. Nos problématiques n’ont rien à voir avec celles de la faune sauvage. Presque personne sur terre ne se lève le matin en ayant peur d’être dévoré par un ours, personne ne doit se battre ou cueillir pour se nourrir, ou mettre deux heures à allumer un feu. Donc lorsqu’on retourne dans un milieu naturel, il faut juste y retourner comme un contemplateur, comme un découvreur, un aventurier, un curieux.
Photo: Pierre Frolla, ©Alexis ROZENFELD
Plonger en apnée ou avec des bouteilles d’oxygène, quelle différence en termes d’expérience ?
Pierre Frolla : La façon d’aborder le milieu est complètement différente. En plongée bouteille, c’est plus “facile” puisqu’on a de l’air, on peut rester longtemps sous l’eau, se poser, revenir à un même endroit… Toutes les grandes observations ont été faites en plongée bouteille, par exemple à l’époque de Cousteau. D’un autre côté, la plongée libre nécessite coordination et connaissance de soi, ainsi que des compétences pour se propulser, retenir sa respiration. L’apprentissage est très long, pour un laps de temps sous l’eau plutôt court. Les grands animaux (baleines, cachalots, otaries) sont plus faciles à observer en plongée libre, car on le fait depuis la surface. Et puis on ne fait pas de bulle, on fait très peu de bruit, on est peu volumineux, donc on est plus fluide. La plongée libre est une façon intéressante de se faire accepter par les animaux.
Pensez-vous que les activités comme la randonnée palmée sont l’avenir du tourisme maritime ?
Pierre Frolla : C’est déjà le cas. Mon école fonctionne à 70 % sur la randonnée palmée. Cette discipline, qu’on appelle en anglais snorkeling, est une activité facile à pratiquer. Le matériel est minimaliste, et l’on est directement en relation avec la faune sauvage, méduses, poulpes, seiches, poissons… Il y a quelques années, ici dans la réserve du Larvotto pendant un baptême de randonnée palmée, on est tombés nez à nez avec un baleineau, c’était complètement fou ! La mer est l’un des derniers espaces où l’on est en contact direct avec la nature sauvage.
Vos plus incroyables rencontres sous-marines ?
Pierre Frolla : J’en citerais deux. Il y a quelques années, je tournais un documentaire animalier avec des enfants. Lors d’une plongée avec Tara, 8 ans, nous nous sommes trouvés nez à nez avec une baleine et son baleineau. Le bébé devait faire 4 tonnes, la petite Tara, peut-être 22 kilos. Il a commencé à jouer avec nous, tant et si bien que la main de la petite m’a échappé et que le baleineau s’est interposé entre nous deux. La mère, qui observait la scène à une quinzaine de mètres en profondeur, est montée en surface. Avec sa nageoire pectorale, qui fait plus de 6 mètres de long, elle a séparé la petite et le baleineau, a créé une sorte de barrière, de sorte que je puisse faire le tour et récupérer Tara. La mère baleine me suivait de son œil comme pour me dire : “Alors, tu vas faire attention à ton enfant maintenant ?” Une grande leçon d'humilité.
Une autre rencontre incroyable a eu lieu en 2007, sur un tournage en Afrique du Sud au milieu des requins tigres. Un petit mâle (3 mètres environ) s'est approché et a commencé à jouer. Je n’avais jamais vécu cela avec un poisson, je ne croyais pas que ce type d’interactions étaient possibles. Descendre, monter, tourner… Je me suis rendu compte qu’il reproduisait tous mes mouvements, avec un effet miroir. À un moment, je me laisse descendre sur le dos, et le requin me rejoint, s’approche tout près. Je tends ma main et il pose son nez sur ma main et me pousse tout doucement vers le fond. Le requin s’est alors éloigné. J’ai tendu la main de nouveau, il est revenu la toucher. C’était complètement dingue.
Les requins et vous, c’est une vieille histoire ?
Pierre Frolla : J’étais terrorisé par les requins étant petit… Il faut dire que je fais partie de la génération des Dents de la mer, un film qui m’a beaucoup marqué. Mais j’ai appris à les connaître, et compris qu’on n’avait peur que d’une chose : de l’inconnu. J’ai compris aussi que là où je plongeais régulièrement, par exemple à l’Îlot Infernal en Nouvelle-Calédonie, je voyais moins de requins chaque année. Jusqu’à n’en voir plus aucun. J’ai donc lancé une campagne de sensibilisation pour faire d’une espèce menaçante une espèce menacée. Cela a été l’un de mes premiers combats pour la protection de l’environnement, à la fin de ma carrière sportive en 2005. Quand j’ai compris que je pouvais faire autre chose de mes capacités de plongeur qu’aller chercher une plaquette numérotée au fond de la mer
L’engagement pour la préservation de la mer a toujours été une évidence ?
Pierre Frolla : Mon père, qui m’a initié à la chasse sous-marine et à la plongée libre, m’a appris à protéger l’environnement dans lequel je vivais. Je suis né en 1975, à une époque où la mer était très polluée, avec des décennies de rejets industriels dans toutes les mers du globe, et notamment la Méditerranée. On parle aussi de déversements sans commune mesure de mazout, de gazole, de vidange de cale de bateau. Tout cela n’existe plus du tout, c’est terminé depuis plus de vingt ans. L’accord Ramoge, notamment, signé en 1976 entre la France, l’Italie et Monaco, a mis fin à tout cela. Et c’est un élan qui part du Prince Rainier.
Cette année, vous êtes ambassadeur du programme The Sea is Green lancé par Monte-Carlo Société des Bains de Mer : qu’est-ce qui vous a séduit dans cette grande campagne ?
Pierre Frolla : D’une part, l’entreprise et moi sommes monégasques, nous faisons partie du même pays, ce qui donne du sens au partenariat. La démarche de Monte-Carlo Société des Bains de Mer est très intelligente et intéressante : rapprocher la cause environnementale, écologique, humaine et civique, du monde du luxe. Finalement, le vrai luxe, c’est pouvoir faire des choses importantes. C’est le temps, c’est la capacité de faire des choix qui soient en adéquation avec nos valeurs. Et puis j’aime la façon dont le Groupe aborde le sujet : en faisant porter des actions par le personnel de l’entreprise. Pour moi, faire adhérer toutes et tous à des idées, à une vision commune, à des valeurs, c’est le plus important.
De quelle manière allez-vous participer au programme The Sea is Green ?
Pierre Frolla : L’objectif de mon intervention est de témoigner de mon expérience, car j’ai une vie qui peut faire rêver et raconte de belles choses. Cela va me permettre de parler de mes voyages et rencontres culturelles, lors de conférences, tables rondes, avec tous les acteurs de l’entreprise.
Vous allez aussi effectuer une plongée au large du Monte-Carlo Beach avec des volontaires. Quel en sera le détail ?
Pierre Frolla : Je vais faire découvrir mon monde, avec une plongée sur la digue récifale, qui est un pont écologique pour l’écloserie des micro-organismes et petits animaux. C’est bien d’en parler, c’est mieux de prendre les gens par la main et de les emmener voir par eux-mêmes.
Photos: Pierre Frolla, ©Fred BUYLE, ©Greg LECOEUR
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